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Le bonheur, ce n'est pas d'attendre que les orages passent, c'est d'apprendre à danser sous la pluie - Sénèque

CuLPaBiliTé, quand tu nous tiens...

culpabilité

La culpabilité est l’émotion perçue par un individu qui est persuadé, en fonction de ses propres perceptions et croyances morales, d’avoir mal agi. Elle est causée par la transgression d'une norme morale. Il s'agit d'une émotion proche du concept du remords, complétée par une volonté de réparer sa faute, et s'accompagnant d’empathie envers les victimes.

Si elle est toujours douloureuse, la culpabilité n’est pourtant pas forcément négative. Dans la classification des émotions morales de Jonathan Haidt, la culpabilité fait partie des émotions « auto-conscientes », celles permettant aux individus de réguler leurs actions. C’est donc une émotion structurante, qui favorise l’empathie, et un repère utile entre le bien et le mal.

Selon Laurent Bègue, psychologue social : « La culpabilité est une expérience émotionnelle désagréable, caractérisée par un sentiment de tension, d’anxiété et d’agitation. Mais, bien avant de constituer une manifestation inadaptée, elle est un signe de bonne santé psychologique ». Elle nous signale que nous avons transgressé nos principes moraux et nos valeurs, garde-fou essentiel pour rester dans le droit chemin. C’est en cela qu’elle est structurante, garante de notre conscience du bien et du mal.

Un peu comme la colère ou la peur qui nous alerte, la culpabilité a une fonction précise. " C'est un atout relationnel, elle nous pousse à observer les expressions de notre entourage, afin de décoder les effets de notre comportement" selon Catherine Aimelet-Périssol, médecin homéopathe et psychothérapeute, spécialiste des émotions.

Vous avez oublié de fêter la fête des mères à votre maman ; vous allez lire sa déception sur son visage ou dans sa voix, et sans doute culpabiliser. C'est une sorte d'apprentissage dont vous allez garder une trace pour éviter par la suite de reproduire ce comportement. La culpabilité sert au "vivre ensemble" ; elle permet d'éviter de nous faire du mal les uns les autres.

" Si nous ne la ressentions pas, nous ne saurions rien des conséquences de nos actions ou de nos paroles sur autrui" poursuit Catherine Aimelet-Périssol. Elle nous met en contact avec "la peine" que ressent l'autre et pourrait même être l'antichambre de la compassion, si elle est bien utilisée.

culpabilité

Pourtant, nous le constatons dans la vie quotidienne, notre sentiment de culpabilité est souvent cause d’angoisses inutiles. Il nous entraîne parfois vers des conduites d’échecs et peut même altérer notre santé.

Transposons donc cet exemple à notre vécu : Nous nous sentons coupables de partir en camping avec des amis au lieu de passer toutes les vacances auprès de notre mère malade. Nous le faisons malgré tout, mais en nous interdisant de profiter de ce moment de détente, forme d’autopunition.

La culpabilité nous permet de trouver d’excellentes raisons de ne pas agir : Je ne peux pas … à cause du manque d’argent, parce que mon fils ne le supportera pas, parce que c’est irréaliste...  Nous nous sentons alors doublement coupables. D’une part de renoncer et, d’autre part, d’adhérer à des critères aussi bassement matériels. Au fond de nous, nous savons que nous nous trompons nous-mêmes, même si tous ces motifs semblent très rationnels, bien ancrés dans le réel.

 

D’où vient notre culpabilité ?

Jacques Lacan disait que, ce qui nous conduit à la plus terrible des culpabilités, c’est de renoncer à son désir, c’est-à-dire à nos aspirations les plus fondamentales…

Très souvent, nous y renonçons de peur de perdre l’amour des autres.

Nous identifions rarement clairement cette culpabilité née du renoncement au désir. Personne ne se dit jamais : « Je me sens coupable d’avoir renoncé à mon désir. » On se dit même exactement le contraire : « Je me sens fautif, vis-à-vis de ma femme, de ma mère, de ceux que j’aime, de penser autant à moi. »

Selon Jean-Pierre Winter, psychanalyste et un spécialiste des pathologies contemporaines, « On ne se sent coupable de suivre ses désirs que lorsque l’on se heurte à une limite morale, lorsque la morale intervient comme frein. Or, nous considérons en fait comme moral tout ce que nos proches ou la société attendent de nous. Dès que nos désirs s’y opposent, nous rencontrons une sorte de barrière, susceptible de nous faire vaciller ».

 

Nous pouvons ainsi être torturés par une culpabilité inconsciente (que nous ne percevons pas) : la conscience morale intériorisée, celle qui nous sert de repère. Souvent induite par notre éducation, notre culture, nos pensées limitantes et généralement trop sévère, elle nous demande toujours plus : « Renonce à tes plaisirs », « Pense aux autres avant de penser à toi », « Tu aurais dû réussir beaucoup mieux », « Tu te complais dans ta médiocrité », etc.

Une vision de nous-même trop idéalisée peut également nous conduire à ressentir nos échecs comme des fautes morales : « Je m’en veux, car je ne suis pas aussi bien que je le devrais ».

Notre culpabilité n’est pas uniquement subjective. Nous sommes forcément coupables de nos insuffisances, innombrables, et de nos petites paresses et lâchetés quotidiennes. Or, dans notre société fondée sur des valeurs judéo-chrétiennes, nous devons viser la perfection et la sainteté : un idéal invivable.

Toute société, toute éducation, repose sur des règles, c’est-à-dire des limites contraignantes. Nous ne pouvons qu’être tentés de les transgresser. Or La culpabilité résulte de la transgression, réelle ou imaginaire, d’une règle morale (faire souffrir, mentir, tromper, voler, tuer…).

Nos culpabilités sont presque toujours disproportionnées. Enfants, nous pouvions par exemple nous reprocher jusqu’au divorce (éventuel) de nos parents. Devenus parents à notre tour, nous nous sentons coupables des difficultés auxquelles sont confrontés nos enfants, de leurs angoisses ou de leurs oppositions. La société et l’éducation prennent une part importante en cela : « éducation bienveillante, pas de fessée, mais pas d’enfant roi », « pas d’alcool, de fruits de mer, de charcuterie ou de crudité mal lavée pendant la grossesse », « ne rien cacher aux enfants de nos émotions, mais ne pas trop les impliquer dans nos difficultés » … Les injonctions que nous recevons sont multiples, parfois contradictoires, impossibles à mettre en œuvre.

Mais culpabiliser pour ce qui ne nous appartient pourrait s’apparenter à une forme de fantasme de toute-puissance, celle du bébé qui croit que le monde tourne autour de lui. Un peu de modestie peut atténuer ces culpabilités « orgueilleuses ». Revenons à plus de réalisme.

 

Un peu violent à entendre ?

Mais tellement libérateur pourtant !

Nous ne sommes pas responsables de tout se que vivent nos proches. Nous n’avons pas ce pouvoir. Revenons à la juste place qui est la nôtre. Nous ne sommes pas parfaits, pas infaillibles. Nous ne pouvons contrôler ni la vie, ni les émotions, ni les rencontres, ni les évènements auxquelles seront confrontés nos proches. Pas plus que nous ne pouvons contrôler cela pour nous-mêmes.

Se sentir coupable entraine une inaptitude à goûter l’instant présent et la saveur des jours. Prendre du temps pour s’occuper de soi, plutôt que des autres, n’a pas été légitimé dans notre éducation. Au point, quand nous le faisons, de ne pas nous autoriser à en profiter pleinement.

 

Apprivoiser votre culpabilité plutôt que de l'ignorer

La culpabilité est vécue comme une intruse, dont on cherche à se débarrasser. Pourtant, elle est utile ! Le réflexe le plus courant, face à la culpabilité, est de vouloir s'en défaire. Le comble est de réagir émotionnellement et négativement à sa propre culpabilité. " On est pris entre ce qu'on ressent et le désir de ne pas le ressentir" explique Catherine Aimelet-Périssol.

La question est : " Qu'est-ce que nous pouvons faire de ce qui vient de se passer ?". Nous avons tous des ressources et des aptitudes pour y répondre, à condition de prendre en compte ou de mieux connaître ce qui blesse l'autre.

Toute démarche d’épanouissement de soi, devrait commencer par une bonne déculpabilisation. Mais le réalisme nous suggère, à défaut de nous débarrasser de toutes nos culpabilités, d’apprendre à mieux vivre avec celles qui restent, commencer un bon ménage, seul ou aidé.

Pardonner

Vivre dans l’autoflagellation peut être, paradoxalement, plus confortable que se pardonner : je paye, puisque je souffre. Mais cet immobilisme peut avoir des effets pervers. Ne pas se pardonner revient à se vivre comme entièrement mauvais et interdit alors toute possibilité de réparation envers sa victime dont on reste l’éternel débiteur. Or, comme l’écrivait le philosophe Vladimir Jankélévitch dans “Le Pardon” (Aubier, 1967), « le pardon brise la clôture du remords, car il est en lui-même un acte libérateur ».

 

Libéré du poids de sa faute, on s’autorise à vivre libre, à nouveau. Il est alors possible de changer de posture, de regarder les évènements avec un œil neuf.

 

Il nous faut en effet apprendre à faire la différence entre culpabilité et leçons tirées de nos expériences passées. La culpabilité est une déconnexion avec le présent, qui nous force à agir aujourd’hui en fonction de quelque chose qui s’est passé hier, que l’on considère comme inutile et préjudiciable pour nous-mêmes, considérant que nous n’avons pas eu le bon comportement.

A l’inverse de la culpabilité, le fait de tirer des leçons de nos expériences passées nous permet d’apprendre de nos erreurs tout en continuant à avancer, de ne plus reproduire certains comportements.

Il s’agit ainsi de faire la bascule entre un positionnement destructeur et un positionnement volontaire et actif.

 

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